OPINION. Si la progression de l’islam politique préoccupe — voire obsède, diront certains commentateurs — beaucoup de Français, le mutisme de la part de nos compatriotes musulmans ne facilite pas les choses. Qu’elles soient culturelles, politiques ou psychosociales, les raisons de ce silence sont nombreuses.

Auteur
Charles ROJZMANEssayiste. FRONT POPULAIRE. 5 septembre 2021
Pour quelle raison une majorité d’Européens de l’Ouest et de l’Est ont-ils obsessionnellement peur d’une immigration de masse dont l’importance est minorée par une partie des élites occidentales ? En réalité, c’est l’islam et sa progression irrésistible dans le monde qui est à l’origine de cette obsession. Que ce soit au Moyen-Orient, dans l’Afrique sahélienne ou en Europe, les revendications religieuses, les attentats commis par des djihadistes, les actes délinquants commis par une frange de la jeunesse musulmane inquiètent les populations en leur faisant craindre à la fois une submersion démographique et une subversion de valeurs et d’identité.
En France, les attaques contre la police dans de nombreux quartiers qui font suite à une dégradation progressive depuis une trentaine d’années du climat sécuritaire font penser à une intifada à bas bruit. Les agressions au couteau de plus en plus fréquentes, les règlements de compte entre bandes, les trafics et délits divers, les incendies d’édifices religieux chrétiens, les crimes terroristes frappant des foules ou dirigés contre des juifs en tant que tels, suscitent bien plus qu’une inquiétude et occupent un espace politique de plus en plus important.
Cette obsession de l’islam et de l’immigration musulmane est critiquée par beaucoup de musulmans qui trouvent qu’on « en fait trop » et qui estiment qu’en insistant sur le sujet, on aggrave les phénomènes qu’on déplore. À l’opposé, beaucoup de leurs compatriotes non musulmans pensent que la grande masse des musulmans vivant en France devrait se révolter publiquement contre les criminels et les trafiquants issus de la communauté, contre ces extrémistes qui donnent une image parfois ridicule, parfois effrayante de la religion alors qu’elle ne le fait pas, à l’exception de certaines personnalités qui s’expriment librement, y compris sur les plateaux de télévision ou les réseaux sociaux et qui, de fait, risquent leur vie chaque jour.
Pourquoi ne le fait-elle pas ? La pression communautaire du groupe qui interdit toute expression dissidente, sous peine d’ostracisme et de rejet familial et social ? Certainement, mais il y a plus important. Des années d’antiracisme militant, et parfois de réelles discriminations vécues par les générations précédentes, ont créé chez beaucoup de musulmans intégrés dans la société française une peur de la stigmatisation et en fin de compte une victimisation qui les amènent à considérer toute critique de leur religion et de ses conséquences dans la vie sociale comme une atteinte personnelle à leur dignité et comme une humiliation. Ils réagissent ainsi à ce qu’ils considèrent comme une offense par un silence qui semble complice alors qu’ils ne se privent pas dans leur cercle familial et amical de s’indigner devant les comportements déviants de la minorité extrémiste ou délinquante. Les jeunes, de leur côté, vont même jusqu’à répondre de façon provocatrice aux questions et aux sondages qui cherchent à mesurer leur adhésion aux thèses fondamentalistes et ainsi démontrer, comme leurs ainés, une cohésion du groupe qui est factice et circonstancielle en réalité.
La guerre des civilisations qui serait selon certains commentateurs déjà effective sur notre sol serait donc à la fois géopolitique, démographique et psychosociale. C’est ce dernier aspect qui est le plus souvent négligé et qui pourtant permettrait d’avoir une influence sur des phénomènes considérés comme inéluctables, à côté d’autres mesures politiques plus radicales.