Sommet européen de Versailles: «Terrain miné»

Par Philippe Gélie

9 mars 2022

L’éditorial du Figaro, par Philippe Gélie.

Il aura fallu l’invasion russe de l’Ukraine, devenue le plus grand champ de bataille en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale, pour que le pow-wow périodique des vingt-sept chefs d’État et de gouvernement se mue en quelque chose de l’ordre du conseil de guerre. Avec le général Macron à la manœuvre, d’autant plus volontariste qu’il est en campagne… électorale, l’«Europe de la défense» est censée franchir «une nouvelle étape», ces jeudi et vendredi, sous les ors de Versailles. Pour les opinions publiques des pays membres, le concept a tout du serpent de mer: depuis le temps qu’on en parle sans vraiment le concrétiser, il semble que ce chantier en soit perpétuellement au stade de l’ébauche.

Sous la pression de l’ogre russe, il se peut que l’on préfère cette fois l’efficacité aux plans sur la comète. Un groupe d’experts suggère de commencer par la montée en puissance d’un solide pilier européen au sein de l’Otan, façon de dépasser une concurrence qui n’a pas lieu d’être, puis de développer une politique industrielle volontariste, afin de réduire un état de dépendance contraire au principe même de souveraineté. Jusqu’ici, on a bricolé à grand-peine des bataillons européens qui se sont révélés presque inutilisables, tant les procédures d’engagement restent lourdes et complexes. Les citoyens européens voudraient tout simplement que leurs armées nationales soient suffisamment fortes pour les protéger et assez coordonnées pour se battre efficacement au côté de leurs alliées. Est-ce si difficile?

Mais la défense européenne reste un terrain miné. À quoi l’Allemagne, partenaire «primordial» longtemps assoupi à l’ombre du bouclier américain, va-t-elle consacrer ces 100 milliards d’euros soudain mis sur la table pour sa défense? Acheter, toujours, des équipements aux États-Unis? Rebâtir son industrie de défense disparue? Les ambitions industrielles et commerciales rivalisent déjà avec les objectifs stratégiques… Du moins Vladimir Poutine, en brandissant une menace existentielle, devrait-il faciliter l’adoption d’une «boussole stratégique», formule éloquente appliquée à des partenaires qui n’ont pas toujours vu le même péril à leur porte.

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