Bloquer les avoirs des personnes portant un nom à consonance russe : en voilà, une idée qu’elle est bonne

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Georges Michel 17 mars 2022. BOULEVARD VOLTAIRE

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La guerre continue de faire rage. En Ukraine, évidemment. Mais ici aussi, chez nous, dans les cerveaux fébriles et féconds de nos compatriotes, tous prêts à participer à l’effort de guerre, de préférence « en distanciel » plutôt qu’« en présentiel », cela va de soi. Faut dire que, depuis la dernière guerre (celle contre le Covid, notamment à l’époque du Grand Confinement), les Français ont pris des habitudes.

Effort de guerre, donc. Hier, par exemple, et par chez moi, une représentante d’association caritative recherchait des casques lourds ne servant plus et que l’on pourrait envoyer à nos amis ukrainiens ! Le casque Adrian de l’arrière-grand-père Gaston qui avait fait 14-18, celui du GI américain, parti trop vite un petit matin de l’été 44, après une nuit torride avec la tante Lucette qui garda longtemps dans les yeux les étoiles du drapeau yankee et, pourquoi pas, le casque de coiffure de mémé Simone qui tint salon pendant quarante ans face la mairie ?

Effort de guerre, tous azimuts. Aucun domaine, aucun segment, aucun secteur de la sociétén’y échappe. Cette ingéniosité à riposter aux Russes, sans pitié et là où ça fait mal, a déjà été évoquée sur Boulevard Voltaire. On voit notamment l’efficacité redoutable de nos administrations nationales et internationales à bloquer les fameux avoirs et autres yachts de luxe des tout aussi fameux oligarques. On imagine que le retour d’expérience de cette guerreatroce permettra, lorsqu’elle sera terminée et qu’on aura le temps, de se pencher sur les milliards qui, dit-on, passent sous les radars de la lutte antifraude. C’est bien connu, les temps de guerre sont des occasions de progrès inouïs, immédiatement transposables dans le civil, une fois la paix revenue.

Effort de guerre : un exemple très concret sur le front du tiroir-caisse ? C’est Le Canard enchaîné de cette semaine qui nous en donne un. Ainsi, le président de la Caisse autonome des règlements pécuniaires des avocats (CARPA) des Hauts-de-France, organisme chargé de gérer les fonds déposés par les avocats au nom de leurs clients, vient de décider de bloquer les avoirs des clients dont « la consonance du nom serait slave ». Au nom, sans doute, du fameux principe de précaution. On croit à une blague, mais non, pas du tout. « La rigueur s’impose si vous voulez être efficaces dans cette lutte contre la Russie », a déclaré le président de la CARPA, par ailleurs bâtonnier de Valenciennes, pour justifier sa décision. À la guerre, c’est bien connu, on ne fait pas d’omelette sans casser des œufs. Alors, zou ! On bloque tous les noms à consonance slave et on fera le tri après. Mais slave comment ? Parce que des Slaves, il y en a pour tous les goûts. Ceux du Sud, par exemple : Croates, Serbes, Slovènes, Bosniaques, Macédoniens. Et puis ceux d’Europe de l’Est : Polonais, Tchèques, Slovaques, etc. Et puis, plus à l’est encore, on a les Biélorusses, les Russes et… les Ukrainiens. Chef, on fait quoi, avec les Ukrainiens ? Pas les Ukrainiens ! Cette diversité slave est, d’ailleurs, un argument de taille pour cet avocat pour contrer ses détracteurs : discriminatoire, cette mesure, voire raciste ? Pas du tout : « La consonance slave regroupe plusieurs États, ça ne peut être discriminatoire », poursuit le président de la CARPA. Bien vu, mais un peu léger, peut-être, non ? On ne sait pas combien de personnes représente ce tri des clients portant un nom à « consonance slave ». Espérons seulement qu’il n’y a pas trop de descendants de mineurs polonais ou de princes russes ayant fui le bolchevisme. Il n’empêche, nous dit un ami avocat, que cette affaire secoue la Conférence nationale des bâtonniers et que cet avocat pourrait risquer des poursuites pénales.

Cependant, bien bordée, l’idée est à creuser. On se demande, d’ailleurs, pourquoi on n’y avait pas pensé plus tôt. Par exemple, lors des guerres en Irak et en Libye, ou encore au plus fort des combats contre l’État islamique. Paraît que ça brassait pas mal d’argent, aussi, dans le coin. Au principe, bien évidemment, que « la rigueur s’impose si vous voulez être efficaces ».

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