Gabrielle Cluzel 23 décembre 2022Religion Société Joyeux Noël
BOULEVARD VOLTAIRE

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Faites-vous partie de ce gang secret qui a frappé durant le mois de décembre dans tous les commerces de France et de Navarre, répondant au nom mystérieux de QFJN : Qui Fête Joyeux Noël ?
Toute se passe au moment précis où, ayant remis le ticket, la vendeuse referme d’un coup sec sa caisse et congédie courtoisement le client pour passer au suivant : « Passez de bonnes fêtes ! » Saisissant son paquet doré par le bolduc, le gang dégaine aussi sec : « Joyeux Noël ! »
Parler de « fêtes », c’est un peu bête car ça ne veut rien dire. On peut fêter tout et n’importe quoi : son bac, son permis, sa promotion, sa guérison, un nouvel emploi… On sent dans ce terme générique prudent un peu de cette inconsciente couardise qui, dans un climat de laïcité exacerbée, noie le poisson – c’est le cas de le dire. Si on avait dit à nos grands-parents que, un jour, on se sentirait une âme de résistant, un courage ébouriffant à souhaiter Joyeux Noël ! À chaque génération ses (petits) combats et notre guerre de tranchées, à nous, est aussi sémantique.
On peut remercier les cheminots cette année grâce auxquels l’expression un peu vintage « trêve de Noël », inventée par le clergé au Moyen Âge – et que l’on vit, en 14-18, apporter un peu de paix jusque dans les tranchées -, a retrouvé une nouvelle popularité et fait florès sur les réseaux sociaux. Grâce à Olivier Véran, qui fait des rimes et donne une leçon de christianisme : « À Noël, on ne fait pas la grève, on fait la trêve », a-t-il martelé sur France Info, mercredi.
Notez que l’on peut claironner « Noël, Noël ! » à d’autres moments de l’année car, autrefois, il s’agissait d’un cri de réjouissance pour toutes sortes de circonstances. Le 31 décembre, par exemple ? Convenons que l’usage est plutôt, ce soir-là, de souhaiter « Bonne Année ! », mais cela non plus n’est pas étranger à la chrétienté : tous nos vœux pour 2023… sous-entendu « de notre ère », ma chère !
On peut tournicoter l’affaire dans tous les sens, édulcorer, occulter, ignorer, contourner, éviter, ratiociner… notre société et notre calendrier en sont tous imprégnés. Et c’est réjouissant : Noël, Noël !
On n’aime rien tant que les pulls en laine véritable, les draps en fil de coton, le jus de fruit 100 % pressé, les purées « maison ». Tout cela a bien plus de prix que les succédanés au rabais fabriqués avec du synthétique, des additifs et autres composants n’ayant originellement rien à voir avec le produit affiché. Alors, pourquoi n’aurions-nous pas droit à un 25 décembre authentique et de qualité, avec de vrais morceaux de Noël dedans ?