Éducation nationale : devoir de réserve ou assignation au silence ?

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Nicolas BOUREZ. Front Populaire

10/05/2023

CONTRIBUTION / OPINION. Le professeur agrégé de philosophie René Chiche a été suspendu pour une durée de trois mois pour ses prises de parole jugées controversées sur les réseaux sociaux. Une décision floue qui menace la liberté d’expression des enseignants, craint notre lecteur.

Éducation nationale : devoir de réserve ou assignation au silence ?

La récente sanction de l’Éducation nationale à l’encontre de René Chiche, professeur de philosophie, pose de multiples questions. Déjà en termes de communication, car il apparaît que ses élèves et sa hiérarchie directe n’ont vraisemblablement pas été informés des vraies raisons de sa mise à l’écart sans traitement pendant trois mois. Ensuite, au niveau des programmes, nous sommes dans une période très importante pour les élèves, juste avant le bac, ce qui ne manquera pas de générer des problèmes de service. Aux parents de s’organiser, bien entendu, pour manifester leur mécontentement si ce n’est leur désaccord, comme toujours à l’Éducation nationale, ils seront mieux écoutés que nous, pauvres agents de l’État que nous sommes.

Et voilà le cœur du problème, car René Chiche saura se défendre et faire valoir ses droits sans l’aide de personne, même si lui apporter notre soutien plein et entier ne peut pas lui faire de mal…

Où commence le devoir de réserve et quand sommes-nous citoyens à part entière ? C’est bien de cela dont il s’agit ! Et c’est pourquoi cette histoire devrait tous nous alerter et nous faire réagir, indépendamment de nos idées.

Nous devons pouvoir tenir des propos sur l’école, sur la société en général et sur n’importe quel autre sujet en particulier, à partir du moment où nous le faisons en dehors de l’exercice de nos fonctions. Ensuite, évidemment que nous ne quittons pas « en nous » notre métier — et donc notre qualité d’agent de l’Éducation nationale —, mais de la même façon, tous les citoyens qui réagissent dans leur vie privée, personnelle, parfois médiatisée, en leur qualité d’être humain qui se définit également par son métier, d’autant plus que notre société accorde une place prépondérante à la situation professionnelle. Je suis malheureusement plus écouté en tant que directeur d’école que certaines personnes qui exercent d’autres professions, y compris quand je ne m’exprime pas en ma qualité de directeur. C’est souvent à déplorer, mais c’est un fait !

Donc je ne pourrais plus rien dire, au prétexte que je suis identifié en tant que directeur d’école par tous ? Bien sûr que non, d’ailleurs, certains enseignants interviennent régulièrement sur les plateaux télé sans que l’institution vienne leur reprocher leurs prises de position, alors qu’ils sont identifiés par la chaîne de télévision qui les emploie en tant que professeurs.

Sans cette possibilité, cela reviendrait à abandonner sa liberté d’expression, et pourrait être assimilé à rentrer dans les ordres, pour n’exister qu’en tant qu’agent de l’État. Eh bien non ! À l’école, dans mes fonctions, je fais et je dis ce pour quoi je suis rétribué par l’État. Je suis fonctionnaire. Mais en dehors, je suis citoyen, et j’ai le droit de parler de l’école ! Il est hors de question que je m’en prive, surtout si on me demande de me taire, car mon mauvais caractère referait surface immédiatement, et pas toujours de façon diplomate.

À noter pour conclure que de nombreux collègues ne se privent pas de faire de l’idéologie dans leurs classes, sans être inquiétés le moins du monde. Dans ces conditions, eux sortent clairement de leur mission et transgressent leur devoir de réserve, mais également de neutralité devant leurs élèves.

Ainsi, de là à penser que l’indignation de l’institution serait à géométrie variable, il n’y a qu’un pas que je franchis allègrement, car les exemples sont nombreux, et je peux en témoigner en tant que parent. Car n’en déplaise à l’Éducation nationale, je ne suis pas exclusivement directeur d’école, j’ai aussi une vie que je compte bien mener à ma guise !

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