Mathieu Bock-Côté: «Le Nouveau Front populaire et le retour de la gauche haineuse»

Par Mathieu Bock-Côté. LE FIGARO

CHRONIQUE – De La France insoumise aux vestiges du socialisme de gouvernement, tous se mettent d’accord pour excommunier la droite et présenter l’autre camp comme celui du diable sorti des enfers.

Ils ont été nombreux, ces derniers jours, à s’étrangler d’indignation devant le Nouveau Front populaire, en accusant ceux qui y participent de sacrifier leurs principes pour aller à la gamelle électorale. Il serait exclusivement commandé par une logique politicienne. L’accusation n’est pas complètement sans fondement : la gauche souhaite naturellement éviter l’extinction électorale. Tous y prennent part, ceux qui rêvent ouvertement d’une révolution violente comme les épaves ectoplasmiques ou bedonnantes du socialisme de gouvernement, qui, hier encore, se scandalisaient à l’idée qu’on puisse même les comparer de loin à La France insoumise. La mémoire est une faculté qui oublie.

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On sous-estime toutefois à quel point la gauche, au-delà de ses différentes sectes, organisations et partis, a en commun un imaginaire lui permettant de se mobiliser immédiatement. Marc Crapez, dans son Précis d’une droite dominée, en 1998, avait décrit cette mécanique : « La gauche est forte en ce qu’elle s’affirme sereinement telle. (…) La capacité de la gauche à être solidaire est d’autant plus accrue qu’elle dispose d’un facteur de mobilisation et de rassemblement sans faille, d’un slogan apte à fédérer l’ensemble de ses composantes : battre la droite. (…). Surtout, la gauche, qui, par essence, est toujours à la recherche d’une nouvelle affaire Dreyfus, a trouvé son chemin de Damas en reproduisant le vieux schéma combiste de la concentration de toutes les gauches, extrême incluse, face à un péril droitier. Celui-ci avait nom cléricalisme comme aujourd’hui racisme. »

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Crapez dit « battre la droite ». On dirait aujourd’hui : battre l’extrême droite, et cela au nom d’un antifascisme qui, toujours, se réactive et change la définition du fascisme à combattre : l’essentiel est de présenter l’autre camp comme celui du diable sorti des enfers.

On oublie que la gauche a la maîtrise du clivage gauche-droite, qu’elle manipule à son avantage exclusif.

La gauche s’autoproclame gauche, et renvoie à droite ceux dont elle ne veut pas. Elle nomme ensuite « droite républicaine » ceux qui s’opposent à ses moyens sans contester sa philosophie, et « extrême droite » ceux qui s’y opposent frontalement.

Le terme « extrême droite » a une fonction exclusivement incantatoire et justifie pour la gauche haineuse toutes les violences, rhétoriques comme physiques. Si jamais le bloc national remporte les élections législatives, elle laissera ses éléments violents se déchaîner dans les rues, puis accusera « l’extrême droite » de susciter des violences.

Multiculturalisme extrême

Ce système d’intimidation fonctionne encore, comme on l’a vu cette semaine à droite, où les barons républicains se sont drapés dans la mémoire du gaullisme pour justifier leur soumission aux injonctions morales de la gauche.

Il y a quelque chose de pathétique à voir des élites déchues s’enfermer dans un monde englouti, comme si le souvenir de leur prestige et leurs derniers privilèges les empêchaient de saisir le nouveau contexte historique qui émerge.

Elles sont à ce point conditionnées dans un système qui a programmé leur assujettissement mental à la gauche qu’elles croyaient combattre qu’elles disent non de toutes leurs forces à une dynamique qui pourrait les libérer de ce piège. C’est le syndrome de Stockholm appliqué au clivage gauche-droite.Cette gauche présente ceux qui lui résistent comme la lie de l’humanité, rassemblant une collection de racistes, de xénophobes, de transphobes, de sexistes, d’individus aux passions tristes, possédés par des sentiments abjects

On ne devrait pas exagérer non plus les supposées contradictions programmatiques de la gauche. Si le Nouveau Front populaire s’empare du pouvoir, on pourra s’attendre tout à la fois à un basculement dans l’immigrationnisme militant et à un multiculturalisme extrême, qui multipliera les « accommodements raisonnables » à l’endroit de l’islam, comme on peut déjà le voir dans les villes gérées par les écologistes, qui justifient la banalisation du burkini au nom du vivre-ensemble.

On peut s’attendre aussi à des lois toujours plus répressives en matière de liberté d’expression, au nom de la lutte contre la haine. De même, elle mettra le cap sur un écologisme de la décroissance indissociable des persécutions fiscales et de la bureaucratisation de l’existence qui l’accompagne. Sans oublier de poursuivre la déconstruction des sexes.

J’ai parlé plus haut de la gauche haineuse, car cette gauche présente ceux qui lui résistent comme la lie de l’humanité, rassemblant une collection de racistes, de xénophobes, de transphobes, de sexistes, d’individus aux passions tristes, possédés par des sentiments abjects et hypnotisés par des théoriciens et des polémistes méphistophéliques, qui auraient signé un pacte affreux avec la bête immonde, et instrumentalisés par d’affreux milliardaires souhaitant soumettre le monde à leurs obsessions.

La gauche haineuse veut en finir avec ce vieux monde. Elle veut l’interdire, le censurer, le rééduquer. Elle rêve d’une grande purge.

Ceux qui refusent de voir la chose en face s’en rendent complices d’avance.

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