Par Carl Meeus et Judith Waintraub. LE FIGARO
Publié le 20/06/202
ANALYSE – Le risque d’une victoire du Nouveau Front populaire n’est pas à exclure. Mais même en cas de défaite, les troupes de Jean-Luc Mélenchon, ayant contesté les résultats de 2017 et 2022, se tiennent prêtes à agir.
Cet article est issu du «Figaro Magazine»
«Si les valeurs n’existent plus, tout est permis», s’inquiétait en début de semaine Bruno Le Maire, devant l’empressement de François Hollande à lancer sa candidature aux élections législatives en Corrèze avec le soutien du Nouveau Front populaire (NFP), ce regroupement des forces de gauche incluant le NPA de Philippe Poutou comme La France insoumise de Jean-Luc Mélenchon. «Il n’y a plus de valeurs, il n’y a que des intérêts.» Pour le ministre de l’Économie et des Finances, qui inclut évidemment Éric Ciotti dans sa démonstration, certains politiques ont montré dans cette période qu’ils défendaient avant tout leur petite boutique au lieu des intérêts du pays.
Comment comprendre sinon que l’ancien président de la République puisse se présenter sous la bannière du NFP, dont le programme prévoit le retour à la retraite à 60 ans! Et propose de «refuser le pacte de stabilité budgétaire»… tout l’inverse de sa politique pendant son quinquennat de 2012 à 2017! Même s’il a combattu la réforme Borne-Macron, il avait fait passer la réforme Touraine qui allongeait le nombre de trimestres nécessaires pour obtenir une pension à taux plein.
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On imagine bien François Hollande la semaine dernière, en échafaudant les plans de son retour en politique dans la perspective de sa candidature à la présidentielle de 2027, dire à Julie Gayet, à la manière de Louis de Funès dans La Folie des grandeurs: «Nous retournons à Tulle, le roi répudie la reine, la vieille épouse le perroquet, Cesar devient roi, j’épouse Cesar et je deviens reine!» La tartufferie est à son comble avec Aurélien Rousseau, le directeur de cabinet d’Élisabeth Borne, qui a piloté la réforme des retraites et se présente lui aussi sous l’étiquette NFP!
Haine de Macron
Ils refusent de voir que leurs candidatures donnent de la crédibilité à ce cartel électoral, et peuvent pousser des électeurs de gauche jusqu’ici réticents, à voter pour le NFP et le porter au pouvoir le 7 juillet! En justifiant leur présence par la «menace grave» que ferait planer sur le pays la victoire du Rassemblement national, ils gomment les aspects les plus nauséabonds de l’alliance avec le NPA et la frange antisémite de LFI. «À gauche, énormément de gens disent: “Les insoumis sont des antisémites et des dangereux, mais là, c’est trop grave! constate la politologue Chloé Morin. Il faut donc se boucher le nez et voter avec LFI pour s’opposer au RN.” Par contre, quand on leur répond: “Vous n’aimez pas Emmanuel Macron, mais là, la situation est trop grave! Il s’agit du RN au pouvoir, donc bouchez-vous le nez et allez-y car les candidats du bloc central sont les seuls qui peuvent réellement l’empêcher d’obtenir une majorité absolue”… tout le monde hurle au scandale et refuse de voter pour les candidats Macron. Il est permis de se demander si le rejet de l’antisémitisme ne serait pas moins important à gauche que la haine de Macron»
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Moteur de la gauche, cette haine du président de la République et de sa manœuvre électorale risque de conduire une partie de la gauche à contester les résultats des 30 juin et 7 juillet, si le NFP ne l’emporte pas. C’est d’ailleurs la logique de Jean-Luc Mélenchon depuis dix ans. En 2017, il assure qu’Emmanuel Macron n’a pas la légitimité pour gouverner le pays. En 2022, pour les législatives, il proclame que la Nupes a gagné le premier tour et que le parti du président est «minoritaire». À chaque fois, avec ses troupes, il tente de capter les manifestations pour en faire un «troisième tour social», espérant renverser le pouvoir. Tout indique qu’il va reproduire les mêmes excès cette année, surtout si le RN de Marine Le Pen, associé à Éric Ciotti, est en position de gouverner. Que feront alors François Hollande et Olivier Faure, le patron du PS?
Ils annoncent la couleur
De diatribes antiriches en justifications de la violence, du soutien au Hamas à l’accueil inconditionnel des migrants, les candidats du Nouveau Front populaire (NFP) et leurs alliés ne cachent rien de leurs intentions. Florilège.
«Si vous gagnez moins de 4000 euros par mois (comme 92 % des Français), vous paierez moins d’impôts avec le #NouveauFrontPopulaire au pouvoir. Rétablir de la justice fiscale: que les gros paient gros et petits paient petit, voici notre projet!» Manon Aubry, eurodéputée LFI, le 18 juin sur X.
«Fiché S, c’est (…) 1- pas censé être public 2- pas une condamnation en justice. C’est une condamnation arbitraire et extrajudiciaire des opposants politiques.» Sébastien Ramage, candidat NFP, à propos de l’investiture du triple fiché S Raphaël Arnault, fondateur de la Jeune Garde antifasciste, le 18 juin sur X.
«Mme Collabo-Roubache n’appellera pas à voter contre le RN quand on aura éliminé ses copains au 1er tour. Après vous avoir précarisé, c’est aux nazillons qu’elle veut vous livrer. Vous votez, elle dégage.» Sébastien Delogu, député sortant LFI, sur la secrétaire d’État en charge de la Citoyenneté Sabrina Agresti-Roubache, le 17 juin sur X.
«Contrairement à ce que dit la propagande de l’officialité, l’antisémitisme reste résiduel en France.» Jean-Luc Mélenchon, le 2 juin sur son blog.
«Israël est une monstruosité sans nom.» Rima Hassan, eurodéputée LFI, le 26 mai sur X.
«Nous devons établir un statut de réfugié climatique en Europe pour que celles et ceux qui fuient, comme au Bangladesh par exemple avec la montée des eaux, puissent avoir un endroit où se réfugier.» Marie Toussaint, eurodéputée EELV, le 6 juin sur France Info.
«Le NPA rappelle son soutien aux PalestinienNEs et aux moyens de lutte qu’ils et elles ont choisis pour résister.» Communiqué du Nouveau Parti anticapitaliste, le 7 octobre 2023.
«Nous avons dans notre pays, la pire des offenses: le premier milliardaire du monde. Oui, les riches sont responsables du malheur des pauvres. Accumuler de l’argent est immoral, puisque ce qui est accumulé, c’est ce qu’on a pris aux autres.» Jean-Luc Mélenchon aux vœux d’un député LFI du Val-d’Oise, le 28 janvier 2023.
«On ne peut pas reprocher à un croyant d’être homophobe si sa religion le lui commande.» Amal Bentounsi, fondatrice du collectif «Urgence notre police assassine» et candidate NFP, sur le compte Facebook de son association, en 2015.
MEMORABILIA 