Jeannette Bougrab au JDD : « Face à un islam délétère, la France doit imposer sa loi avec toute sa force »

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ENTRETIEN. Le gérant d’un magasin Geox à Strasbourg est la cible de menaces de mort après avoir refusé une intérimaire voilée. Une manifestation de notre vulnérabilité face à un islamisme qui tente d’imposer sa loi affirme Jeannette Bougrab qui rappelle que le voile est un symbole de soumission de la femme.

Propos recueillis par Ayrton Morice Kerneven20/04/2024 LE JDD

L'ancienne secrétaire d'État chargée de la Jeunesse et de la Vie associative Jeannette Bougrab.
L’ancienne secrétaire d’État chargée de la Jeunesse et de la Vie associative Jeannette Bougrab. AFP / © saget 1

Le gérant d’un magasin Geox du centre-ville de Strasbourg a refusé une intérimaire voilée. A-t-il eu raison de le faire ? Faut-il y voir un signe d’un islamisme qui cherche à imposer sa loi ?

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Depuis plusieurs années, un islam radical plaçant la loi de dieu au-dessus de tout tente de s’imposer en France en s’attaquant aux principes mêmes de notre pacte républicain.

Il y a presque quinze ans, on était peu nombreux à défendre la crèche Baby Loup qui avait inscrit dans son règlement intérieur – comme la société Geox aujourd’hui – un principe de neutralité applicable à ses collaborateurs. La petite crèche avait été créée par une femme remarquable, Natalia Baléatola, une réfugiée politique qui avait fui la dictature de Pinochet. Elle a été traînée dans la boue pour avoir mis fin au contrat de travail d’une salariée qui refusait de travailler sans voile. La bataille juridique fut rude, et encore plus la violence quotidienne que subirent la directrice et ses équipes. La Cour de cassation leur donna raison le 25 juin 2014, mais entre-temps, la crèche installée à Chanteloup-les-Vignes, dans un quartier difficile, n’a pas survécu au harcèlement. Elle a dû déménager.

Le Code du travail a depuis été modifié et donne la possibilité aux entreprises de prévoir une clause de neutralité religieuse applicable à ses salariés. La justice européenne a d’ailleurs confirmé à plusieurs reprises que l’employeur pouvait proscrire le voile sur le lieu de travail.

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À Strasbourg, ce pauvre responsable de magasin ne faisait donc qu’appliquer les dispositions du règlement intérieur de son entreprise proscrivant tout signe religieux ou politique en refusant une intérimaire voilée. Cette dernière a filmé l’échange au cours duquel elle a essayé de faire dire à son interlocuteur que le voile est interdit, alors que lui parle simplement de tenue adéquate. Elle a mis sur les réseaux sociaux la vidéo qui a été vue plus de 1,4 million de fois. Le responsable du magasin, accusé d’être islamophobe a été insulté et menacé de mort.

Or sur TikTok, on voit la jeune femme rigolarde expliquer qu’elle est nouvelle voilée et qu’elle a omis de changer sa photo sur son compte LinkedIn. Elle ne pouvait pas ignorer l’effet mortifère de sa vidéo à un moment où un proviseur a été contraint de démissionner pour avoir voulu faire respecter la circulaire du ministère de l’Éducation nationale interdisant le port de l’abaya dans les établissements scolaires du premier et second degré.

J’insiste sur les aspects juridiques de ces affaires, car la règle de droit est essentielle dans une démocratie. Mais encore faut-il la faire respecter. Or aujourd’hui quand vous tentez d’appliquer les règles votées par le Parlement ou prises par le gouvernement de la République, vous êtes menacés de mort par de funestes bigots islamistes. Et ce ne sont pas des paroles en l’air. Comment ne pas penser à Samuel Paty décapité à la suite d’une série de mensonges déversés sur les réseaux sociaux ? Pour moi, la première mesure doit être de sanctionner durement tous ceux qui profèrent des menaces explicites ou implicites en se réclamant de l’islam.

La France connaît désormais les crimes de déshonneur

Le voile est devenu un étendard politique, un instrument de conquête…

La seule certitude, c’est que la femme dans l’islam classique est un être inférieur et impur. C’est le sens du voile islamique que nous voyons aujourd’hui de plus en plus en France et qui nous vient des zones reculées du Moyen-Orient ou du Caucase, là où les hommes cloîtrent les femmes et les voilent s’ils sont obligés de les laisser sortir. Ce sont les dernières générations de migrants et de réfugiés arrivées en France qui ont apporté ce voile avec elles, de même que d’autres comportements archaïques.

Comment ne pas penser à Shaïna, poignardée et brûlée vive dans un cabanon car considérée comme une fille facile alors qu’elle avait été violée ? Ou à Samara, passée à tabac car se maquillant, ou encore à la mort récente de Shemseddine, collégien de 15 ans, car il correspondait avec une fille dont les frères estimaient qu’il portait atteinte à la réputation de leur famille – ou ce jeune Algérien Rachid, poignardé à mort par un Afghan qui lui reprochait d’avoir consommé de l’alcool le jour de l’Aïd…

La France connaît désormais les crimes de déshonneur. Tous ces comportements archaïques auraient dû disparaître au contact de la France, de sa culture et de son droit, de sa générosité. Or, il n’en est rien. Au contraire, on voit aujourd’hui défendus ou même exaltés par l’extrême gauche et par les frères musulmans. Peut-être avons-nous mal pris la mesure des nouveaux migrants, peut-être n’avons-nous pas fait ce qu’il convenait. Raison de plus pour mettre un terme à tout cela. Face à un islam délétère, il faut que la loi s’impose à tous et avec toute sa force, sans retenue. Dura lex, sed lex comme disaient les Romains.

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Il faut se couvrir les cheveux, dissimuler ses formes… D’où vient l’obsession des islamistes pour le corps des femmes ?

L’islam interdit les relations sexuelles en dehors du mariage. Or de très nombreux jeunes des classes populaires dans les pays musulmans n’ont pas les moyens de se marier et de fonder un foyer. Dans des situations permissives, par exemple un soir de fête du Nouvel An en Allemagne en 2016 ou bien lorsque le peuple se soulève contre Moubarak en Égypte en 2010, les femmes sont attaquées. Les islamistes font alors peser la responsabilité du viol sur les femmes qui selon eux, non voilées, aguicheraient des hommes et se mettraient ainsi en situation de risque.

Kamel Daoud en a parfaitement décrit les ressorts après les agressions sexuelles à Cologne : « L’islamiste veut voiler la femme pour l’oublier, la nier, la désincarner, l’enjamber. L’islamiste se sent mal dans son corps et la femme le lui rappelle. Il a un rapport trouble avec le vivant et la femme qui donne la vie lui rappelle que lui l’islamiste donne la mort. Et cela le piège, car il trébuche et retombe sur terre et en veut à la femme pour cette impossibilité d’enjamber la vie pour étreindre le ciel. Elle est donc son ennemie et pour pouvoir la tuer, il la déclare ennemie de Dieu. »

En lisant ces mots, j’ai beaucoup de mal à ne pas penser, avec effroi, aux femmes israéliennes victimes, le 7 octobre 2023, de l’attaque monstrueuse du Hamas qui s’est acharné sur elles en les violant, en les mutilant, en les assassinant.

Le voile et l’abaya sont les symboles de l’enfermement du corps de la femme

Que répondez-vous à ceux qui affirment que le voile est une affaire de choix et qu’il participe à l’émancipation des femmes ?

Le voile répond à des prescriptions religieuses rigoristes, pour respecter l’awra, la « pudeur ». Les femmes doivent se couvrir les cheveux, dissimuler les formes de leur corps dans des tenues larges noires, beiges surtout pas chatoyantes pour ne pas attirer le regard des hommes. Le voile et l’abaya sont les symboles de l’enfermement du corps de la femme. Ils traduisent ce rapport maladif des musulmans extrémistes avec le corps de la femme dont je vous parlais à l’instant.

Le voile n’est aucunement un facteur d’émancipation mais un instrument d’asservissement. Le voile libère la femme comme la chaîne retient l’esclave. Mais je reconnais que de plus en plus de femmes en France le portent librement et certaines d’entre elles sont les nouvelles zélatrices d’un islam rigoriste. Les plus radicales ont rejoint les rangs de l’État islamique et ont été complices des bourreaux du calvaire des Yazidies esclaves de l’État islamique, se montrant parfois pire que les hommes.

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Alger, Téhéran, Riyad : le voile est un enjeu encore plus tragique dans bien des pays…

Si aujourd’hui à Téhéran, après notamment l’assassinat de Mahsa Amini par une patrouille de la police des mœurs, des femmes et des hommes se lèvent pour dénoncer ce symbole de soumission et d’enfermement, à Paris, ces voix sont encore trop peu nombreuses.

Je peine en particulier à comprendre celles et ceux qui se complaisent à disserter de manière abstraite sur l’émancipation par le voile. Partout, il y a des femmes qui souffrent dans leur être et dans leur chair d’oppressions réelles. Je pense aux Iraniennes, aux Afghanes, aux Nigérianes et aux Saoudiennes aussi, qui ne sont pas des victimes du sous-développement. Entre le silence des uns et les constructions pseudo-intellectuelles des autres, aujourd’hui beaucoup de féministes sont devenues les alliés objectifs de ceux qui asservissent la femme au nom de l’islam.

On devrait écouter Masih Alinejad, iranienne, journaliste et défenseuse des droits de l’homme, réfugiée aux États-Unis et dont la vie est menacée par le régime des mollahs de Téhéran. Elle voyage à travers le monde pour essayer de convaincre des dangers de l’islamisme. Elle nous dit par exemple que si nous ne faisons rien un jour, nous ferons tous face au fléau qu’elle a combattu en Iran, « un islamiste qui dira à votre fille de ne pas se rendre à la piscine, de ne pas rentrer dans un stade ou de se couvrir les cheveux ».

Malheureusement, force est de constater qu’il y a des endroits en France où il est déjà trop tard.

*Jeannette Bougrab est essayiste et docteur en droit public. Elle a notamment publié Lettre aux femmes voilées et à ceux qui les soutiennent (Cerf, 2019) et Un silence de mort (Cerf, 2020).

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