Quand le pape déclare la guerre à ses propres fidèles

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En dressant une muraille autour durite traditionnel, François ne cache pas son intention d’éradiquer la mouvance traditionaliste, pourtant d’une grande vitalité au sein de l’Église. Une politique aussi absurde que suicidaire. Edito *Laurent Dandrieu est rédacteur en chef culture de “ Valeurs actuelles ”.

Par  Laurent Dandrieu. Publié le 25 juillet 2021 VALEURS ACTUELLES

Le Pape François ©Grzegorz Galazka/Mondadori Portf/SIPAPartager cet article sur FacebookTwitterLinkedIn

Pour une fois que quelque chose marchait au sein de l’Église catholique, il fallait bien que quelqu’un s’attache à le briser : il est pour le moins scandaleux que ce soit le pape lui-même. Depuis que Benoît XVI, par son motu proprio Summorum pontificum de 2007, leur avait permis de sortir du ghetto, les traditionalistes ne cessaient de se développer. Très minoritaires dans l’Église, ils fournissent aujourd’hui une part croissante des vocations – jusqu’à 25 % en France certaines années. Au-delà de la croissance démographique de ses familles nombreuses, ce milieu ramène à la foi de nombreux jeunes, séduits par la sacralité de la liturgie traditionnelle et l’évidence avec laquelle elle manifeste la présence réelle de Dieu. Or c’est cette liturgie que le pape François vient de remettre encage par son motu proprio Traditionis custodes.

Par son texte désormais abrogé, Benoît XVI avait réaffirmé sa légitimité, la requalifiant en « forme extraordinaire » du rite. Pour François, la liturgie réformée est désormais « l’unique expression » durite romain. L’ancien rite ne sera toléré que le temps nécessaire à ses fidèles pour « retourner » à la liturgie post conciliaire. C’est donc la disparition à terme des traditionalistes que vise le texte, et bien une guerre totale que lance François contre la mouvance la plus jeune et la plus dynamique de son Église.

Le pape interdit aux évêques de leur accorder tout nouveau développement. Les communautés existantes célébreront « hors des églises paroissiales » (soit laqua si-totalité des églises) et seront supprimées si elles sont jugées défiantes par rapport à la liturgie de Paul VI ou au Concile. Vatican II est érigé en critère premier de la foi : au lieu de se préoccuper des 70 % de catholiques américains qui ne croient pas que l’Eucharistie soit vraiment le corps du Christ, le pape veut qu’avant tout on croie au Concile. Tout se passe comme si François était le chef d’une Église qui, plutôt que de rendre un culte à Dieu, s’autocélèbre comme l’institution qui, par la grâce de Vatican II, a libéré le christianisme de l’obscurantisme des siècles passés. Dans cette Église-là, ceux qui se préoccupent avant tout de suivre le Christ et de faire vivre l’héritage de la Tradition ne peuvent être vus que comme des ennemis.

Ils sont accusés par le pape (sans preuve) de se considérer comme la “ vraie Église ” et de “ blesser l’unité ” du catholicisme. La confondant avec une uniformité caporalisée, c’est au nom de l’unité que le pape les voue aux catacombes, les met sous surveillance d’évêques transformés en simples préfets, les condamne à une mort lente dans des réserves d’Indiens, dans des périphéries où l’on se promet de ne les visiter que pour les surveiller. Sèche, cassante, péremptoire, la lettre qui accompagne ces mesures n’a pas un mot paternel pour ces fidèles : il ne traduit à leur égard que mépris et méfiance, avec une violence qui a choqué jusqu’à nombre d’évêques, qui s’en désolent en privé. Contrairement aux lefebvristes de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie-X (FSSPX), ils avaient fait le choix de la fidélité à Rome et en sont aujourd’hui récompensés à coups de bâton. Le principal effet de cette politique de gribouille sera de jeter les fidèles dans les bras de la FSSPX, la mouvance la plus hostile à Vatican II, et d’assurer le triomphe au sein de celle-ci de sa tendance la plus dure, celle pour qui rien de bon ne saurait venir de Rome…

Les traditionalistes, eux, ne se reconnaissent pas dans la caricature que brosse d’eux le pape. Ils relèvent que les évêques français eux-mêmes, dans un rapport à Rome, avaient dû convenir que leur relation avec eux était désormais « apaisée ». Ils savent qu’être catholique, ce n’est pas être disciple d’un concile, que ce soit Vatican II, Nicée ou Trente, mais disciple du Christ. Que leurs centaines de jeunes prêtres n’ont pas donné leur vie pour se conformer à tel ou tel concile, mais pour se conformer au Christ et apporter sa lumière aux âmes enfermées dans la prison du mal et de la désespérance. Ils demandent simplement qu’on laisse leurs prêtres faire du bien aux âmes, plutôt que de les tourmenter avec des querelles cléricales d’un autre âge.

Se désolant de l’indélicatesse faite à Benoît XVI, qui aura vu, impuissant, son successeur François piétiner son héritage de son vivant, blessés de voir celui qu’ils veulent envers et contre tout considérer comme leur pasteur les maltraiter comme des brebis galeuses, les traditionalistes souffrent surtout devoir qu’un nouveau mur est dressé, par celui-là même qui dit les détester pardessus tout, entre nos contemporains et la richesse rédemptrice offerte par le Christ en sa liturgie. Et, avec cette décision qui remplace un motu proprio de paix liturgique par un autre de division, de voir la tunique de l’unité déchirée par celui-là même qui est censé en être le garant.

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Mais qu’attendre d’autre d’un pape imprégné des idées de la « Théologie de la Libération » ????

Artofus

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